Larges extraits de l'article, réalisé par Alban Gourgouse,
paru ce jeudi 28 Mars dans la République du Centre,
consacré à Cédric Largajolli.
(pour précision : certaines parties de texte n'ont pas été reproduites à l'exactitude)
Largajolli.
Ce nom vous dit sûrement quelque chose. L'Orléanais est un triathlète, spécialiste des longues distances. Incompris par beaucoup, Cédric se livre comme jamais. Sa voix douce est à l'opposé de sa réputation. Parce que Cédric Largajolli a une réputation. Pas très flatteuse pour certains (plutôt élogieuse pour d'autres). Il n'est pas très aimé d'un certain monde sportif ( celui du Triathlon). Pourquoi ? A l'écouter on comprend tout de suite. Cédric n'est pas formaté. Pas dans le moule.
La cause ? Peut-être (et sûrement) cette maladie qui s'est introduite insidieusement en lui à l'adolescence : "J'ai souffert d'anorexie de 13 à 17 ans, confie Cédric. " A la fin je pesais 38 kilos. J'étais un cadavre ... On est dans un système où on ne s'intéresse pas à l'humain ou très peu. J'avais un mal-êre intérieur. Et je suis en colère contre le système scolaire qui n'a pas vu quelqu'un en souffrance."
L'anorexie. Une maladie dont on parle peu. Surtout chez les hommes : " c'est une honte pour un mec d'être anorexique. En fait je ne mangeais pas. Je buvais et je travaillais mes cours pour oublier que j'avais faim. C'était un appel à l'aide qui n'a pas été entendu."
Et heureusement le sport est là. Littéralement pour lui sauver la vie : "cela m'a servi de guérison. C'était un échappatoire. J'ai quand même senti que ce que je faisais n'était pas sain. Dans l'année du Bac je me suis remis au sport. J'ai voulu revenir à un équilibre comme avant mes 13 ans. Et là, mes professeurs ont convoqué mes parents parce que la chute de mes notes était alarmante. Alors que c'était une sortie d'anorexie très positive. Ca m'a révolté. Parce que je passais de 18/20 de moyenne à 12/20, c'était le drame ! "
Décalage, incompréhension, problèmes de communication, les quinze années suivantes de la vie de Cédric Largajolli en seront jalonnées. " Je ne voulais pas l'admettre (sa maladie), donc je me suis remis à fond dans le sport. Je me suis crée une carapace à ce moment-là. Parce que je ne voulais surtout pas qu'on aille creuser.
C'est cette carapace qui va gêner. Sur Internet, blogs et forums critiquent un Cédric Largajolli qui se renferme sur lui-même : "ceux qui me connaissent réellement, m'aiment. Ceux qui ne me connaissent pas, m'attaquent. C'est de la bêtise, tout simplement ", avoue celui qui a crée l'association Phénix (en 2005) (réinsertion par le sport pour les gens en difficulté sociale). " Quelqu'un qui a un minimum d'humaniste comprend qui je suis. Les gens pensaient que je m'éclatais en faisant du sport. Pour moi c'était un combat intérieur profond. J'ai essayé de communiquer au début, mais je n'arrivais à expliquer pourquoi je faisais du sport, d'où cette incompréhension. Quand ça fait 5 ans qu'on vous humilie, au bout d'un moment vous n'avez plus envie de communiquer ... alors j'ai crée une carapace très très forte. Je voulais changer le monde. Mais les gens n'ont pas compris. Ils voyaient juste un mec qui courait torse nu ".
Parce que vous l'avez peut-être croisé un jour, dans le sud de l'agglomération orléanaise courir ainsi. Craneur ? Mégalo ?, c'est mal connaître Cédric Largajolli : " cela ne me correspond même pas. J'ai commencé à faire ça en 2005-2006. En fait je suis super introverti. Mais c'était ma double personnalité. Comme dans le film Fight Club. J'avais tellement de douleurs en moi ... J'étais tout le temps jugé pour rien, j'ai donné aux gens de la matière à juger : je me suis mis à courir torse nu. Comme ça j'avais l'impression qu'on jugeait l'autre et pas moi. Je me suis senti mieux."
Cédric ne travaille pas, vit chez ses parents. Et alors ? Apparemment cela dérange. " On me posait la question : pourquoi tu t'entraînes tout le temps ? Mais laissez moi tranquille ! ". Pour échapper à cette pression il s'évade. Australie, Israël, il parcourt le monde pour faire des triathlons Ironman (3.800 km de natation, 180 km de vélo et enfin 42km195 en course à pied).
JE NE PEUX PLUS REMONTER SUR UN VELO
Il s'entraîne. Beaucoup. 700 km de vélo, 100 km de course à pied et 20 km de natation par semaine, plus du renforcement musculaire. 35 à 40 heures de sport par semaine, pas vraiment le temps pour trouver du travail (des sponsors, hélas non plus, sauf quelques aides ponctuelles en provenance de collectivités territoriales, Conseil Général du Loiret, notamment).
" Cétati de la dévotion au sport. Pour moi c'était la seule façon de m'en sortir. De faire la paix avec moi-même. Il y avait tellement de gens qui voulaient m'empêcher d'aller jusqu'au bout de ça, c'était comme s'ils voulaient me tuer. J'ai failli craquer il y a cinq ans. C'était un environnement horrible. Pesant même. J'étais devenu le pire des mécréants alors que j'avais fait une quête idéaliste."
Une quête qui va se terminer dans le désert israélien en début d'année : " On est tout seul face à soi-même pendant environ 11 heures, face à la nature, face à des gens qui ont une quête à peu près similaire à la vôtre. Les trois fois où je suis allé en Israël, des trucs en moi se sont débloqués. C'était profond et puissant. J'ai compris que j'étais prêt à lâcher ma carapace. "
Un Cédric Largajolli enfin apaisé alors ? " J'avais besoin d'expier toute la colère qui était en moi. Et le triathlon m' permis ça. Je suis allé au bout de mon chemin. J'ai essayé de m'entraîner à nouveau depuis que je suis rentré mais cela n'a plus de sens. Je ne peux plus remonter sur un vélo. J'ai fait la paix avec moi-même".
CEDRIC et le LMA
Alors qu'il est sur le point d'arrêter son sport en 2010, Cédric fait une rencontre : " Je voudrais remercier Antony Vair-Piova (alors Président du LMA Meung-sur-Loire). Il m'a beaucoup apporté. En 2010 j'étais enfermé dans mon image. J'ai failli arrêter. Antony m'a redonné espoir. Il a compris qui j'étais. Je lui dois beaucoup. Mon club, le LMA, représente la convivialité du sport. "
Saluons ici un grand champion.
Un garçon hors gabarit
qui, pendant toutes ces années,
a défié et repoussé l'irréel.
Fort dans sa tête et dans son corps.
Phénix triomphe toujours.
Ses adversaire sont au tapis, leurs esprits maléfiques ont regagné l'Enfer.
Le voici de nouveau libéré.
Pour le plus grand bonheur des siens et de tout son entourage.
qu'il veuille bien ici nous excuser
de ne l'avoir apprécié
autant qu'il aurait du l'être